vendredi 15 mai 2015

Le paradoxe de la balance.

La balance, cet appareil de torture (non finalement à côté le cellu-cup est une petite joueuse) qu'on a souvent envie de balancer par la fenêtre mais qui finalement trône dans un coin de notre salle de bain....


Pendant longtemps je me suis fichue éperdument de la balance, je n'arrivais même pas à comprendre comment on pouvait se prendre la tête pour un chiffre et je comprenais encore moins pourquoi on me harcelait avec ce fameux chiffre entre mon médecin de l'époque qui me faisait sans cesse des réflexions sur mon poids alors que j'avais un poids normal et je ne parle des insinuations du médecin scolaire...

Et puis il y a eu cette décision un jour de perdre deux kilos en Première, c'était au printemps 2000, ça ne nous rajeunit pas. Je n'étais pas encore une accro de la balance, je me pesais uniquement pour vérifier si je perdais du poids. Ça fonctionnait à merveille d'ailleurs, c'était bien agréable de voir mon poids descendre doucement, de sentir de la satisfaction et de la fierté à chaque gramme perdu.

Il a fallu attendre au moins 6/8 mois pour que je suis devienne une accro du pèse personne, quand je me suis retrouvée à l'hôpital contre mon grès pour anorexie. Je pesais alors 40 kg toute mouillée, je ne comprenais même pas comment j'avais perdu autant de poids sans m'en rendre compte. Pour l'hôpital 40 kg ce n'était pas suffisamment maigre alors on m'a seulement menacé de m'hospitaliser si je ne reprenais pas un peu de poids. N'ayant pas envie de me retrouver en isolement entre 4 murs je les ai pris aux mots, j'ai repris 2 kg pour qu'on me fiche la paix, ce qui a parfaitement fonctionné mais j’avais tellement peur de grossir plus que j'ai commencé à me peser plusieurs fois par jour.

Pendant des années c'est la balance qui a décidé du tournant de mes journées : 100 g de plus elle était bonne, 100 g de plus elle était mauvaise.



Je n'hésitais pas à mettre la balance dans ma valise pour partir en vacances....

Et puis un jour l'anorexie restrictive a laissé place à l'anorexie compulsive. Mon corps affamé c'est rebiffé.J'ai mangé, mangé... ce n'était pas de la boulimie mais je mangeais suffisamment pour grossir et reprendre mon poids d'avant, celui que je ne voulais plus, celui qui me donnait la sensation d'être obèse..au point de ne plus oser monter sur la balance, j'avais une peur bleue du chiffre qui pouvait s'afficher.

Pendant des années j'ai fui la balance et il était hors de question que je connaisse mon poids. Je me pesais de dos chez le médecin (enfin je le fais toujours parce que voir mon poids à la maison à jeun c'est une chose, mais le voir habillé, l'estomac rempli et la vessie pleine ça reste traumatisant même si ce sont des faux kilos. Mais j'ai de le chance, mon doc est compréhensif pas comme sa remplaçante qui la dernière fois m'a presque rigolé au nez...) Pendant ma grossesse je n'ai jamais voulu savoir mon poids. Je ne voyais pas l'intérêt de me faire du mal, parce que oui enceinte on grossit c'est inévitable (dommage).

On est dans une société où le poids définit l'individu et je peux vous dire que ne pas savoir combien on pèse ou ne pas vouloir savoir son poids pose problème. Enfin ça pose problème aux autres qui ne comprennent pas qu'on peut vivre en harmonie sans se résumer à un chiffre qui ne veut finalement pas dire grand chose. Je me souviens encore de mon premier rendez-vous à la maternité et de cette saloperie de sage-femme irrespectueuse qui s'est débrouillée pour que je vois mon poids...

J'ai commencé à me repeser après la naissance de ma fille. Avec le sport j'avais pris du muscle j'étais donc plus fine mais aussi plus lourde qu'avant si bien qu'à 16 ans au même poids j'étais « plus grosse » Au lieu de me faire du mal j'ai préféré ne plus me peser et faire confiance à mes vêtements et à mes sensations. Enfin de temps en temps ça m'arrivait de vérifier en montant sur la balance le souffle coupé par peur du résultat. Chose stupide quand on y pense.

Ca fait un an que je me repese au moins une fois par semaine. Entre mon déménagement et l'amoureux j'avais repris quelques kilos...le jour là j'ai été traumatisée...bon je suis sure que personne ne l'avait vu mais bon... J'ai refait plus attention à ce que je mangeais mais pas toujours simple avec les compulsions alimentaires qui s'invitent par moment. Je me suis remise de plus belle au sport. En me pesant une fois par semaine j'ai vu que le poids variait pour X raisons...enfin je le savais déjà mais avant je n'arrivais pas à faire la part des choses. A chaque fois je note le résultat dans un coin de mon carnet comme pour garder une trace.



Je me pèse le jeudi. Pourquoi le jeudi ? Parce c'est loin des excès du week-end. Si mon poids me convient je ne me pèse plus avant la semaine suivante...sinon je suis capable de me peser le vendredi, le samedi, le dimanche... Dans l'absolu je finis par me lasser au bout de quelques jours.

Même si je prends mon poids avec des pincettes je sais qu'il ne me laisse pas indifférente. Alors non je ne veux pas qu'il baisse de trop, je n'ai plus cette envie de maigreur mais j'avoue que je préfère toujours 100 g de moins que 100 g de plus. Maintenant un kilo de plus ou un kilo de moins je le supporte je sais que ça peut être les hormones, de la rétention de caca par mes intestins, de la rétention d'eau...ça reste désagréable à vivre mais je le vis un peu près bien.

Mais des fois pour je ne sais quelles raisons ça varie un peu plus et j'avoue que dans ce cas précis je me laisse atteindre et je flippe. Je me sens alors coupable d'avoir trop mangée alors que mon alimentation est restée la même. Dans ces moments là il faut que je me fasse violence pour ne pas arrêter de manger justement car ça aurait à terme l'effet inverse car à force de privation on craque sur tout.Il faut juste attendre. Attendre le lendemain. Attendre la semaine semaine. Priez une puissance supérieure qui n'existe pas avant de monter sur la balance pour voir apparaître le bon chiffre. Et surtout ne pas se laisser envahir par le stress qui a cette fâcheuse tendance à me faire manger des cochonneries.



Je pourrais ne plus me peser. Mais j'ai ce besoin de savoir, savoir que mon poids est stable, savoir que je ne perds pas trop, savoir que je ne prends pas. Et de toute manière même si je ne me pèse pas, la peur de grossir reste la même. Même si avec les années cette peur se calme, elle reste là cachée dans un coin de ma tête.

Je me dis des fois que la solution serait une balance indépendancemètre pour me rassurer en sachant ma masse grasse, ma masse maigre et tout le tralala. Mais est-ce que des chiffres supplémentaires changeront quelque chose ? Fondamentalement non, mais comme on dit l'espoir fait vivre. Et quitte à se peser autant que ça soitle plus complet possible. 

Un jour peut-être j'arriverais peut-être à me détacher de tout cela, après tout j'ai déjà bien avancé. Et puis quand je vois  le grand nombre de femmes qui se prenne la tête avec leur poids, je me sens moins seule. 


2 commentaires:

  1. Comme je te disais sur Facebook, c'est un sujet qui me parle et que j'ai moi-même évoqué dans un article il y a quelques semaines... Je me reconnais tellement dans ton article, hors l'anorexie... J'ai également des compulsions alimentaires, j'essaye de les gérer et j'avoue que le soutien de mon chéri est indispensable et m'aide beaucoup. Et quand je mange quelque chose de plus gras que d'habitude, je sais que mon poids va prendre un coup le lendemain ou le jour d'après et pourtant...je n'arrive pas à m'empêcher de vérifier. Du coup, j'intensifie le sport, pour être sûre de décapiter ce kilo en trop. Et comme d'habitude, il repart... Et donc ma journée est bonne. Et quand il revient, ma journée est mauvaise... C'est un cercle vicieux mais je pense qu'en même temps ça nous rassure d'avoir une sorte de contrôle... Et pour info, j'ai une balance indépendancemètre depuis 3-4 mois et, crois-moi, ça ne change rien de voir que même quand tu as pris 200 g c'est du muscle et que ta masse grasse a elle bien baissée... J'ai à peine 13% de masse grasse et ça m'atteint quand même...

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    1. C'est exactement ça, on a l'impression d'avoir le contrôle. J'ai d'ailleurs remarqué que souvent mes troubles alimentaires permettent de canaliser et contrôler mon stress. Les compulsions alimentaires ça va mieux depuis que je les accepte bon ça fait quand même chier j'ai l'impression que les jours là mon monde s'écroule et que je vais devenir obèse. Ah sacré poids!

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